L'histoire de 3 générations
Tout a commencé hier. Coup de fil à ma mère, 85 ans cette année, pour prendre de ses nouvelles. Elle va bien et me demande si je vais au meeting de Mélenchon le 19. Elle a envie d'y aller mais pas toute seule.
Un rassemblement est prévu à Ivry, place Jean Ferrat pour un départ collectif en tramway. Ok, ça me va bien. Aujourd'hui je propose à mon fils de 18 ans de nous accompagner. Ce serait son premier meeting politique et dimanche il votera pour la première fois. Hésitations. Il appelle son meilleure pote pour lui proposer de venir.
En route pour Ivry. On se gare pas loin du moulin après avoir été chercher ma mère.
Rassemblement. Ma mère fière comme Artaban de présenter son petit fils à ses camarades de combat, militante depuis des décennies. Pour moi, retrouvailles avec tout un tas de gens avec qui j'ai milité il y a fort longtemps. Ivry a été la ville de mes premiers combats.
En route vers la station de tram.
Soudain, le coup d'oeil, l'image à faire :
Vico la honte. Boîte française, issue d'une coopérative de producteurs, vendue à un trust italien. La boîte fermée après un déménagement sauvage des machines. Délocalisée et des dizaines d'emplois supprimés. Des hommes et des femmes sacrifiés, broyés, au nom du profit supérieur à l'Homme...
Les ballons rouges à caser dans le tram bondé :
L'entrée dans le pavillon immense. Nous sommes dans une gigantesque travée. D'où nous sommes impossible d'apercevoir l'estrade. Heureusement des écrans géants retransmettent le meeting.
Les jeunes qui ont récupéré des drapeaux s'amusent, participent, gagnés par l'ambiance festive.
Ils ont aussi récupéré des badges qu'ils arborent fièrement.
Jean-Luc Mélénchon semble prendre un plaisir rare ce soir, à expliquer, à convaincre, à combattre les fausses vérités, les falacieuses certitudes avec des mots simples, des exemples tirés de la vie quotidienne de nous tous qui souffrons. Pédagogue, parfois lyrique, il annonce les luttes à venir, les combats prochains pour refuser toute soumission au système financier et à ceux qui le servent. Ces soi-disants penseurs qui jusqu'au dernier jour préfèrent la Le Pen à Mélenchon.
La salle est attentive et réactive. Résistance résonne à de multiples reprises. Symbole d'une volonté de réagir porté, amplifié par des milliers de poitrines dans un élan commun de consciences individuelles enfin retrouvées. Que nous sommes loin de tout embrigadement, de ces racontars qui veulent nous faire passer pour des êtres dénués de sens critique. Nier cette réalité, c'est assurément se préparer des lendemains douloureux pour eux. Ils veulent nous voir avec leurs yeux formatés. Ils nous reprochent juste ce qu'ils sont, sans même avoir conscience que l'intelligence qu'ils nous dénient, va nous servir à les abattre.
Grand moment d'émotion, avec ces milliers de mains jointes dans une immense chaîne humaine, pour entamer l'Internationale, suivie de l'hymne national.
Retour vers Ivry par le tram. Assis à côté d'une femme, elle me demande gentiment si moi aussi j'étais au meeting de Mélénchon. Nous discutons tranquillement. Elle m'explique qu'elle travaille dans une université depuis très longtemps pour 1 400 euros par mois. Elle veut voter Mélenchon mais ne croit pas possible que le SMIC soit porté à 1 700 euros. Je lui explique comment c'est possible, en répartissant autrement les richesses, en réintégrant au travail les 10 % des richesses qui ont été accaparés par les dividendes. Elle me demande ce que je fais. Je lui explique qu'à 55 ans je suis chômeur, plus indemnisé, que je galère pour trouver des missions de formateur payées parfois 15 € de l'heure brut.
Le mot de la fin revient au copain de mon fils. Dans la voiture, je les interroge sur leurs sensations. Il me dit, enthousiaste, "c'est super ! Un candidat qui parle d'amour et de poèsie".
Qui que vous soyez, quoi que vous pensiez, prenez la peine d'écouter le dernier discours public de Mélenchon avant le premier tour. Il devra être disponible sur le net et je le rajouterai ici.
Juste une vie plus belle, enfin humaine, faite de luttes, d'amour et de poésie...
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